En France, sur un des territoires les plus fragilisés par le dérèglement climatique, l’industrie fossile s’apprête à construire une nouvelle infrastructure qui nous enfermerait dans un avenir fossile pour des décennies, alors que les réserves de charbon, de gaz et de pétrole actuellement exploitées sont tellement importantes qu’elles ruinent toute chance de maintenir le réchauffement climatique en dessous de 1,5°C.

Ce projet gigantesque s’appelle MidCat. Il prévoit dans sa première phase, nommée STEP, la construction de centaines de kilomètres de gazoduc pour relier la Catalogne sud, aux Pyrénées-Orientales et à l’Aude. Ce projet est un nouveau symbole de projets gaziers n’ayant aucune justification, pas même économique, mais pourtant portés et soutenus par la Commission européenne et consenti par le gouvernement français aux dépens du respect de l’Accord de Paris et de la loi sur la transition énergétique.

Prenons les choses en main : exigeons des élu.e.s locaux des Pyrénées-Orientales et de l’Aude qu’ils affichent leur opposition au projet en adoptant une délibération s’opposant au projet !

 

Voici quatre raisons pour lesquelles

il est nécessaire de bloquer MIDCAT

 

1 – C’est un projet climaticide

MidCat est un projet de gazoduc traversant l’est des Pyrénées et visant à doubler les capacités des interconnexions gazières existantes entre la France et l’Espagne. Le projet, qui pourrait transporter 7,5 bcm de gaz par an dans les deux directions, nécessite la construction d’environ 1250 km de pipelines, dont 800 km en France et 450 km en Espagne.

Sur un des territoires les plus fragilisés par les dérèglements climatiques, le projet Midcat est une nouvelle infrastructure qui nous enfermerait dans une trajectoire fossile pour des décennies, alors que les réserves de charbon, de gaz et de pétrole actuellement exploitées sont tellement importantes qu’elles suffisent à elles seules à nous faire sortir de la trajectoire d’un réchauffement de +2°C.

Tandis que l’industrie fossile met tout en oeuvre pour nous laisser penser que le gaz est une énergie de transition, il n’en est rien. Le gaz n’a pas plus d’avantages que les autres énergies fossiles : il est essentiellement composé de méthane, qui est l’un des gaz à effet de serre les plus puissants (selon le GIEC, le méthane présente un pouvoir réchauffant 86 fois supérieur au CO2 sur une période de 20 ans). Même à de faibles taux de fuites (accidentelles ou volontaires), son impact sur le climat peut dès lors être conséquent. Sur certains sites de production de gaz aux Etats-Unis, par exemple, jusqu’à 9% de la production totale de gaz s’échappe dans l’atmosphère.

Il n’y a pas de place pour le gaz dans le budget carbone de l’Europe après 2030 : une étude récente publiée par le Centre Tyndall de Recherche sur le Changement Climatique montre que, dans ce contexte, le futur du gaz en Europe est plus que limité. Si l’on partage le budget carbone global entre les différentes régions du monde, la part restant à l’Europe pour rester en dessous des 2°C sera épuisée dans 6 à 9 ans au rythme actuel d’émissions de CO2. L’étude montre que si l’Europe pouvait instantanément reporter sa consommation actuelle en pétrole et charbon sur le gaz, le continent gagnerait, au mieux, trois toutes petites années d’émissions de CO2.

La concertation publique qui s’est tenue dans les Pyrénées Orientales et dans l’Aude a été dénoncée par le collectif contre le gazoduc transfrontalier Stop Midcat luttant contre le projet. Ils ont notamment pointé du doigt le périmètre restreint de celle-ci : la discussion sur l’opportunité du projet a été évitée, pour se concentrer seulement sur la question du tracé que pourrait emprunter le gazoduc. Pourtant, le seul débat pertinent aujourd’hui est celui sur la sortie des énergies fossiles et fissiles en Europe.

Teréga (le promoteur français du projet, ex-TIGF) argue que cette infrastructure permettra le développement du gaz renouvelable dans les départements concernés. Pourtant, le projet de gazoduc a été pensé pour transporter du gaz fossile, non du gaz renouvelable qui nécessite d’autres types d’infrastructures.

Nous rappelons donc avec force que ce projet est en incohérence totale avec le besoin urgent de renoncer à la construction des nouvelles infrastructures fossiles tels que l’exigent nos engagements internationaux pour le climat et la loi française sur la transition énergétique.

Une transition énergétique locale et juste pour tou.te.s, reposant sur les énergies renouvelables, l’efficacité et la sobriété énergétiques, est à portée de main. Exigeons de nos représentant.e.s qu’ils.elles cessent de protéger l’industrie fossile.

 

 

2 – Des impacts locaux dévastateurs

L’extraction du gaz, comme son transport, présentent les mêmes aspects néfastes que les autres énergies fossiles : contamination des nappes phréatiques, pollutions de l’air, consommation excessive d’eau, expositions à des agents cancérigènes, à des perturbateurs endocriniens ou à des polluants excessivement dangereux. Depuis plus de 10 ans, les études scientifiques le prouvent. .

Pour réguler ce transit, il est nécessaire de construire des stations de compression qui ont des implications directes pour les populations et les écosystèmes locaux. Pour réaliser le projet MidCat, plusieurs stations doivent être construites en France, à Barbaira, Montpellier, et Saint Martin de Crau. Ces installations sont l’une des sources industrielles le plus nocives en terme de pollution atmosphérique.

De même, le transport comporte des dangers évidents pour les milliers de personnes à proximité. Les accidents liés aux ruptures de conduites sont possibles et potentiellement mortels. C’est en raison de cette dangerosité que la législation française impose des zones tampons entre les infrastructures gazières et les zones habitées ou industrielles. Enterrée à 1 mètre seulement, une partie du tracé du MidCat se trouve en zone inondable dans la vallée du Rhône, près des sites nucléaires de Marcoule et du Tricastin ; une fuite voire une explosion pourraient ainsi provoquer une catastrophe majeure.

Dans la région des Pyrénées Orientales et de l’Aude, le collectif contre le gazoduc transfrontalier dénonce les dommages créés par la canalisation enterrée les zones naturelles, qui menace de laisser une cicatrice indélébile dans les paysages, en mettant notamment en danger une partie de la forêt de chênes liège des Albères. Il s’inquiète également de l’entrave à l’écoulement des eaux des nappes superficielles, dans des territoires déjà extrêmement fragilisés par la sécheresse, ainsi qu’une atteinte grave à l’économie locale, en altérant l’agriculture et le tourisme. Côté espagnol, il est prévu que le gazoduc traverse des espaces naturels remarquables, classés Natura 2000, et les terres agricoles de la province de Gérone.

 

 

3 – Un investissement inutile et risqué

L’interconnexion gazière STEP d’environ 230 km de long entre la France et l’Espagne, au coût approchant les 450 millions d’euros, peut être considérée comme la première phase du méga-projet gazier MidCat, dont l’investissement total s’élève à la somme astronomique de 3,1 milliards d’euros.

Le soutien de la Commission européenne à ce projet se traduit concrètement par l’obtention du statut de “projet d’intérêt commun”, ouvrant la voie à des financements publics conséquents. Teréga et Enagas, les entreprises porteuses du projet, ont déjà reçu plus de 4 millions d’euros venant de fonds européens pour financer des études préalables et la concertation publique.

En avril 2018, une analyse, menée par le cabinet finlandais Poyri et commanditée par la Commission européenne, portant sur la viabilité économique et l’intérêt stratégique du projet STEP, a fuité : elle démontre très clairement que le projet n’est pas viable économiquement, qu’il n’a aucun intérêt s’agissant de la sécurité énergétique des deux pays, et qu’il pourrait même faire augmenter les tarifs du gaz en France.

Le caractère confidentiel de cette étude a été critiqué à plusieurs reprises, notamment suite au refus de la Commission européenne de la transmettre à la députée européenne Michèle Rivasi et dans le cadre de la consultation locale menée dans l’Aude et les Pyrénées orientales par l’opérateur Teréga. Dans un rapport de juin 2016, la Commission de Régulation de l’Énergie manifestait déjà ses doutes sur l’intérêt d’un tel projet.

De plus, si du gaz devait être transporté de la France vers l’Espagne grâce au gazoduc – ce qui est très discutable car cette infrastructure a de grandes chances de rester un tuyau vide – il s’agirait essentiellement de gaz russe. La logique du projet ne pourrait donc pas être plus ironique puisqu’il renforcerait notre dépendance au gaz russe, soit exactement l’inverse que ce que l’Union européenne cherche à faire en construisant de nouveaux projets gaziers.

L’Union européenne s’engage dans une politique de développement tous azimuts d’infrastructures gazières. Cette politique entre en contradiction avec les objectifs climatiques affichés par l’Union européenne, puisqu’elle revient à enfermer le continent dans plusieurs décennies supplémentaires de consommation de cette matière fossile.

Puisque le projet ne remplit pas les objectifs établis dans le cadre l’Union Énergétique Européenne en termes de soutenabilité et de sécurité énergétique, nous demandons que le gouvernement français respecte ses engagements climatique, et qu’il refuse que la Commission Européenne lui attribue le statut de “Projet d’intérêt commun” dans la prochaine liste, et qu’elle ne lui fournisse plus aucune fonds supplémentaires.

 

 

4 – Pour la justice climatique

 

Le gaz prévu pour passer dans le gazoduc MidCat pourrait être une porte d’entrée directe au gaz exploité en Algérie et notamment dans le Sahara sud. L’extraction de gaz au Maghreb est majoritairement entre les mains d’entreprises européennes, qui cherchent à utiliser des technologies (telles que la fracturation hydraulique) interdites dans leur pays d’origine en raison des risques sanitaires et environnementaux qui lui sont liés : un témoignage clair de néo-colonialisme.

En Algérie, au début 2015, la révolte des habitants du sud Saharien, inquiets notamment pour leurs ressources en eau avait réussi à bloquer temporairement les projets gouvernementaux d’exploitation du gaz de schiste. Mais sous l’effet de la crise économique, le gouvernement vient de les relancer.

Toute résistance contre la construction de gazoducs permettant le transport de gaz algérien est un acte de solidarité avec les populations locales, qui sont en première ligne des dérèglement climatiques.

 

 

La résistance grandit

 

S’inscrivant dans un mouvement global d’opposition aux projets d’infrastructures gazières, la résistance locale contre ce projet est grandissante des deux côtés des Pyrénées, la résistance locale contre ce projet grandit des deux côtés des Pyrénées, rejoint par des députés européens, organisations locales, nationales et européennes, ainsi que déjà 10 municipalités et le Conseil Départemental des Pyrénées Orientales se sont déjà déclarés opposés au projet.

Fin avril, onze député.e.s européen.ne.s ont également adressé.e.s une lettre à Emmanuel Macron l’invitant à signifier à son homologue espagnol son opposition au projet STEP, notamment à l’occasion d’un sommet politique entre la France, l’Espagne, le Portugal et la Commission européenne qui devrait se tenir au second semestre 2018.


 

Mobilisons-nous et bloquons ce projet dangereux et inutile. Exigeons des élu.e.s locaux des Pyrénées-Orientales et de l’Aude qu’ils affichent leur opposition au projet en adoptant une délibération s’opposant au projet :

Signer la lettre

FacebookTwitter